Beppo

         A Herne vivait – bien avant la construction du City-Center – une famille de 2 enfants . Ralf avait 5 ans , sa sœur Anke 2 ans .
        Un jour , leur mère alla faire les courses au centre commercial Karstadt et remarqua un étrange client qui , de manière ininterrompue , remontait l’ escalator jusqu’au 1er étage et redescendait de l’autre côté : c’était un jeune boxer avec de grands yeux marrons . Il attendait manifestement son maître ou sa maîtresse sans savoir où il ou elle était . Comme le chien lui faisait pitié , cette femme attira l’attention du responsable de magasin sur ce qui se passait , à la suite de quoi il lança un avis de recherche au micro . Comme personne ne se manifestait , la dame laissa son adresse , acheta un collier et emmena le chien avec elle .
        Lorsqu ‘ elle l’aperçut , Anke s’adressa à lui en lui attribuant le nom de « Beppo » , nom qui , du reste , était totalement inconnu de la famille . Il n’est donc pas surprenant non plus que le nouveau pensionnaire désignât alors Anke comme sa maîtresse : Il la regardait jouer , veillait sur son sommeil et se montrait toujours prêt à la laisser lui grimper sur le dos .
       Il maintint cette amitié pendant toute sa vie….de chien . A sa manière , il s’occupait des autres membres de la famille : il mangeait et buvait avec eux à leurs heures , regardait la télé avec eux , de préférence les films policiers , et fut très vite propre , toutes choses dont ils s’accommodèrent très bien . Quand  des visiteurs pénétraient dans la maison , il ne s’intéressait visiblement pas à eux , mais ne les laissait plus ressortir tant qu’on ne les lui avait pas désignés comme de «  gentilles personnes »  .

       Ce fut pour lui un changement ( et le grand moment de sa vie ) lorsque le voisin Buttgereit , qui jusqu’alors n’ avait pas de chien , fit l’acquisition d’un berger allemand et exhorta la famille à ne plus laisser Beppo en liberté parce qu’il avait un chien extrêmement « acerbe «  . Et en effet ils ne firent  rien de plus au début  , dans la proximité immédiate  des deux maisons , que se renifler et déposer leurs odeurs . De temps en temps , ils se lorgnaient lors de leurs promenades conjointes , mais sans jamais déroger à leur bonne éducation .

       Mais il arriva un jour ce que le destin avait voulu : Beppo trouva une porte  , et le berger une fenêtre ouvertes . Grondements sourds et gémissements aigus indiquèrent un événement qui ne pouvait être confondu avec une querelle humaine . Beppo se tenait debout pattes écartées au-dessus du berger qu’il avait saisi à la gorge . Et en  raison de la  forme de sa mâchoire , il ne put le lâcher que lorsque son propriétaire eut résolu le problème grâce à d’épais gants de cuir . Monsieur Buttgereit menaça d’appeler la police et les forces de l’ordre . Face à cela , Beppo se montra gai et content de lui . De plus , comme toutes les questions relatives à leurs « quartiers » respectifs  avaient désormais leur réponse , il ignora ensuite  complètement le berger .

       Beppo mourut 15 ans plus tard , pleuré par la famille , après une longue vie  - si on calcule en années humaines , il était presque centenaire  .

 

Auteur : Wolfgang Viehweger                                                       Traduction : Colette Martin
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